Méditation décapante !
Bonjour et Bienvenue cher visiteur !
Quel ressort secret vous pousse à venir traîner vos savattes dans ce brocabrac hétéroclite de la « kultur » ? Vous êtes-vous égaré ? Si vous recherchez quelque chose d’autre que cette littérature « imbitable », refermez vite cette page ! A moins que le mot « décapant », associé à méditation, n’ait émoustillé votre curiosité ! Là encore, vous faites fausse route ou bien vous avez emprunté le mauvais trottoir. Le cours de méditation… c’est en face ! Ici, vous êtes dans un restaurant, le « Grand Restaurant de la Pensée Unique ».
- N’auriez-vous pas fait attention à l’enseigne ? N’importe ! Votre visage virtuel m’est sympathique…
- Allez, pas de chichi ! Suivez-moi, j’ai une petite table tranquille au fond de la salle, près de la porte des toilettes. Vous y serez bien pour déguster le plat du jour du chef !
– Désirez-vous un apéritif ?
Tout commença justement, voici quelques mois, par un apéritif philosophique servi sur le plateau de ma messagerie. Un apéro « Brut Zéro » (pour les connaisseurs), sans amuse-gueules, en provenance d’un serveur masqué et peu soucieux de dévoiler son anonymat. Je l’ai pris en pleine gueule… l’apéro ! Qu’ai-je donc fait pour mériter une telle libation ? Du coup, ça m’a donné faim ! Sans attendre, je me suis mis au fourneau…
- Vous prendrez bien un apéritif cher visiteur ! Tenez, voici notre carte !
AU GRAND RESTAURANT DE LA PENSEE UNIQUE
PLAT DU JOUR MIJOTE « AUX PETITS OIGNONS »
(12 € TVA incluse)
« On n’enseigne pas ce que l’on sait ou ce que l’on croit savoir,
On n’enseigne et on ne peut enseigner que ce que l’on est. »
Jean Jaurès (Extrait de L’Esprit du socialisme). Je ne savais pas que Jaurès l’avait mijoté ! Je suis très ignorant ! Pourtant ce ragoût philosophique, aussi proche de l’aphorisme que de l’enthymème, est vieux comme le monde… Il a fait baver les lèvres d’illustres « amis de la Sagesse », de Lao-Tseu à Saint-Exupéry en passant par Pythagore, Gautama le Bouddha, Socrate, Montaigne, consorts et épigones… Recuisiné au milieu des années quatre-vingt par les nouveaux chefs de la pseudo pensée humaniste, cet apophtegme ontologique, safrané d’ingrédients exotiques à bon marché, s’affiche encore aujourd’hui comme la toute dernière recette « New Age » proposée au menu du « Grand restaurant de la Pensée Unique »… Assiette « savoureuse » qui se déguste au milieu des faux-semblants, entre les indices boursiers à la baisse et les Ressources Humaines à la hausse ou inversement. Bref, « un plat dont même les chiens ne voudraient pas ! « pour reprendre la phrase de Nietzche.
« On n’enseigne pas ce que l’on sait ou ce que l’on croit savoir,
On n’enseigne et on ne peut enseigner que ce que l’on est. »
Néanmoins, la formule d’origine reste un sujet noble de composition culinaire dont l’essentiel est contenu dans le hiatus qui sépare les deux propositions. En touillant un peu le fond de la marmite – attention ça sent le brûlé ! - que remarque-t-on ? Que la notion d’enseignement s’approprie une place qui n’est plus la sienne dans la seconde proposition, du coup, elle tombe en désuétude par le jeu de la refonte du savoir en connaissance. D’aucuns diront que ce point de vue n’est que pur sophisme ! Non point ! A méditer, car vu du dehors, l’enseigne ne renseigne pas forcément sur la nature du produit à enseigner, pas davantage sur celle de l’enseignant qui en aurait la vocation cul-l’y-nerf… Une chose semble certaine, vu du dedans, la double proposition se désenseigne radicalement sous l’intrication des « paradoxes ».
A ce point crucial de la cuisson, ajoutons du sel et du poivre à la sauce en rappelant la pensée oraculaire de Goethe : Deviens ce que tu es ! Remarquable exhortation repassée au fourneau et sous le fouet culinaire des grandes toques de la nouvelle cuisine des particules. Schrodïnger, l’un des pères de la physique quantique, ne pratiquait jamais la méditation sans la présence de son chat… enfermé dans une boîte ! Peu de temps avant sa mort « théorique » ( le chat ou le maître ?), il écrivit en guise de testament spirituel : « comment pourrais-je vous parler de mon moi puisqu’à chaque instant je ne suis identique à moi-même… » C’est dire que dans la cuisine de pointe, le moi n’est jamais à l’abri d’un coup de spatule dans la tronche ! En attendant, la physique sub-quantique rejoint étonnement les grandes intuitions héraclitéennes. Le Maître d’Ephèse (cinq siècles avant l’incarnation du Logos en chair et en os – oups !) ne nous a-t-il pas gratifié d’apophtegmes croustillants et succulents dont celui-ci que j’ai plaisir à vous servir en entremets :
« Nous descendons et nous ne descendons pas dans le même fleuve, nous sommes et nous ne sommes pas. La route droite et courbe est une et la même, la route vers le haut et le bas est une et la même… «
Magistral ! Vingt-cinq siècles avant Einstein, Niels Bohr et l’équation de Schrodïnger, Héraclite annonçait déjà la théorie mathématique de la « superposition des états » dans l’univers quantique. Revenons à notre chat attiré par l’odeur alléchante du plat du jour qui mijote sur le feu de la pensée et de la non-pensée. Que semble nous dire le minet, de ses yeux perçants et scintillants, pareils à deux particules sorties tout droit de l’insondable ? Que nous sommes moi et non-moi à la fois ! Que nous sommes dedans et dehors à la fois ! Que nous sommes ignorance et connaissance à la fois ! Que nous sommes mort et vivant à la fois ! ! !
Je pressens ce que vous allez me dire :
- Où voulez-vous en venir ? Où est le problème ? Ca commence à bien faire votre cuisine minable à la con ! Vous n’avez rien d’autre à glander que de vous faire chier à cuisiner dans l’incurable… pour 12 € ? A vous lire, je ne sais plus qui je suis, où j’en suis… Vraiment, vous me coupez l’appétit ! Et votre chat, j’ai envie de le mettre dans la marmite !
Je vous rassure, vous êtes sur la bonne voie mais tenez compte de la décohérence ! Si le doute venait à vous surprendre, le seul conseil que je puisse vous donner serait d’appeler les « renseignements ». Sinon, en cas de dérangement voire en désespoir de cause, installez-vous sur le siège « cul-l’y-nerf » en compagnie de votre chat – si vous en avez un – et méditez le contenu sibyllin du proverbe arabe suivant :
« C’est déjà du savoir de connaître qu’on ne connaît pas ce qu’on ignore. »
Alors là, je sens que la moutarde commence à vous monter au nez ! « Mettez la plutôt dans votre assiette, le plat du jour n’en sera que plus parfumé ! » Dans le cas contraire, si le mets s’avérait indigeste, n’hésitez-pas à ouvrir une dive bouteille de Chinon, car comme le disait notre bon et charitable Maître Alcofribas Nasier (François Rabelais) :
« Si l’appétit vient en mangeant, la soif s’en va en buvant… »
Bon appétit !
Post scriptum :
Décidément il est épouvantable ce cuistot ! Comment en serait-il autrement ayant fait sa rhétorique chez Lucifer ou Lucie-ferre ou encore « Lux ferre »… En substance, il faut savoir plaisanter et faire bon visage à ceux qui plaisantent mais, soit dit en passant, nul ne s’improvise « porte-flambeau » de la plaisanterie…
Gaby le Thélémite (Nice octobre 2009)
Intéressante proposition pour les méninges !
REPONSE : Au risque de me répéter… « L’humour est l’eau de l’au-delà mêlée au vin d’ici-bas… » Un puissant antibactérien qui protège de la méningite ! DeejaYogi.
fame a dit ceci 22 mai, 2010 à 16:40